Les nappes souterraines sont surveillées comme le lait sur le feu. Et en Charente, nappes souterraines et eaux superficielles ont une constante: le marquage aux pesticides. Avec, en plus, une problématique nitrates pour les cours d’eau.
«Ce qui ne signifie pas que l’eau du robinet est contaminée, insiste Patrice Flour. Par les traitements curatifs, l’eau du robinet est tout à fait potable». Ce qui engendre un surcoût.
Si la Charente n’est pas le pire département de France en la matière, le tableau de bord n’est guère réjouissant. Dans le cadre de la directive européenne sur la qualité des eaux, l’agence de l’eau Adour-Garonne avait pour objectif que 60% des eaux de son territoire soient de «bonne qualité» à horizon 2015.
Pour la Charente, qui partait de loin, l’objectif qualité n’était que de 37%. Aujourd’hui, seuls 14% des cours d’eau sont considérés de bonne qualité. 86% sont donc considérés de «moyenne», «mauvaies» ou «médiocre» qualité. L’objectif de 37% est repoussé à 2021, voire 2027. «C’était pourtant un objectif modeste», regrette Patrice Flour.
«L’agriculture raisonnée ne suffit pas»
En Charente, la situation est particulière. Au-delà de la pression agricole, de celle des communes et des particuliers, «la géologie a un impact important». Explications: «En Charente, le sol caillouteux et perméable favorise la contamination des eaux souterraines. En plus, les nappes sont peu profondes. A activité agricole équivalente, il faut faire plus d’efforts en Charente que dans le Lot-et-Garonne par exemple», décrit Patrick Flour pour qui il est impératif de «faire plus d’agronomie et moins de chimie".
"Dans ce département, la culture raisonnée ne suffit pas. Il faut absolument que l’agriculture évolue et passe d’une agriculture déjà raisonnée vers une agriculture qui intègre plus l’agronomie. C’est indispensable», exhorte le directeur de l’agence de l’eau. Qui reconnaît: «Des efforts sont déjà faits. La consommation de produits phytosanitaires a tendance à se stabiliser désormais».
Surtout, il ne pointe pas du doigt que l’agriculture. «Les collectivités doivent aussi prendre conscience du phénomène. Même si elles n’utilisent que de 10 à 15% des herbicides, elles les utilisent sur des surfaces imperméables qui amplifient le ruissellement», dit-il. Sans parler du jardinier amateur, accro au Round up et ayant tendance à avoir la main lourde.
Pour contrer le phénomène, divers programmes ont été mis en place: le programme Re-sources, initié par la Région, pour protéger les captages d’eau potable, le plan éco-phyto, développé par la chambre d’agriculture et ses partenaires, le label Terre Saine, pour les communes ayant éradiqué les pesticides.
Un contrat de territoire est en cours de négociation avec le syndicat du Né, aussi. «Les nappes d’eau y sont dégradées. On met en place des actions sur trois ans pour reconquérir ce bassin», décrit Patrice Flour. Un bon début, qui semble indispensable. «Aujourd’hui, la situation est sous-contrôle. Mais pour qu’elle ne devienne pas incontrôlable, il est indispensable de faire évoluer les pratiques agricoles, celles des communes et des particuliers».
Extrait Charente Libre 31/05/2014.